Menu
Libération
reportage

Les murmures de Berlin

Article réservé aux abonnés
Il y a vingt ans, le Mur cessait d’être une frontière. Suivre sa trace au fil de ses 44 kilomètres, c’est la garantie de voir s’ébrouer bien des beautés, mais aussi certains monstres.
Des pans du Mur de Berlin conservés en l'état, le 6 juillet 2009. (AFP John Macdougall)
publié le 31 octobre 2009 à 0h00

Comment s'y prendre quand la mission est d'arpenter une frontière qui n'existe plus, le long d'un mur dont il ne reste rien ? La frontière c'est celle qui du 13 août 1961 au 9 novembre 1989 sépara Berlin-Ouest et Berlin-Est. Le mur, c'est LE mur (44 kilomètres de béton, 3,60 mètres de haut et une quinzaine de centimètres d'épaisseur) qui, si l'expression intra muros ne prenait pas à Berlin une tournure singulière, courait du sud-est au nord-ouest de la ville. Le mur, Die Mauer des deux côtés, mais qu'on qualifia vite «de la honte» en République fédérale allemande (RFA) et «mur de défense antifasciste» en République démocratique allemande (RDA). Et puis quel mur exactement ? Au début des années 70, le mur officiel, celui qu'on découvrait de l'Ouest tout barbouillé de graffiti, fut doublé à l'Est par un second mur dit «mur intérieur». Entre les deux, une ceinture de sécurité d'une largeur variable (de 50 à 100 mètres selon les secteurs), une «zone de mort» que les autorités de la RDA ne cessèrent de perfectionner : sablage du sol pour relever les empreintes des fuyards, chevaux de frise, herses métalliques posées à plat (dites «champs d'asperges» à l'Est et «gazon de Staline» à l'Ouest), clôtures électriques, détecteurs de mouvements et engins de tirs automatiques. Le tout éclairé jour et nuit par des lampadaires et surveillé depuis des centaines de miradors et bunkers par les soldats des troupes frontières, armés