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Libération
TRIBUNE

La Turquie a sa place dans une Europe politique

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publié le 13 novembre 2009 à 0h00

On ne peut nier l'évidence : les négociations d'adhésion de la Turquie à l'Union européenne provoquent un malaise en France. Mais le malaise de qui ? L'argument serait démocratique : «les Français sont contre», nous dit-on. Cela n'est pas aussi simple. Un sondage Ipsos, lors de l'ouverture des négociations en 2004, en avait donné la claire illustration. A la question «êtes-vous favorable à une adhésion de la Turquie ?», la réponse est non à 56 %. Mais à la question «si la Turquie fait les efforts politiques et économiques nécessaires, est-il possible d'imaginer son adhésion dans l'avenir ?», la réponse se renverse avec un oui à 63 %.

Le malaise ne vient donc pas de l’opinion : les Français sont ouverts à une entrée, à terme, de la Turquie. Le malaise vient des élites. Si la Turquie devient l’exutoire des inquiétudes de la population vis-à-vis de l’islam, de l’immigration et du chômage, c’est parce que trop de leaders d’opinion, jusqu’au sommet de l’Etat, à droite mais aussi à gauche, en agitent le spectre. Et que face à eux, ceux qui s’exposent pour mener la bataille publique en faveur de la Turquie se comptent sur les doigts de la main. Nos élites politiques et intellectuelles seraient-elles devenues islamophobes, ou turcophobes ? C’est tout le contraire. Leur rejet de l’adhésion turque n’est pas lié à la Turquie mais à l’Europe, à leur conception du projet européen.

Il est vrai que la Turquie pose un problème nouveau. Jusqu’ici, les élargissements