«Vous voyez ces terres ? lance la jeune femme en désignant les rizières en terrasses au fond du vallon. Ce sont les premières que nous avons saisies. Depuis, nous mangeons enfin à notre faim.» Le district de Koraput, à l'est de l'Inde, est ces jours-ci le théâtre d'une petite révolution. Les populations tribales, qui constituent l'écrasante majorité dans cette région montagneuse, s'emparent des terres des autres communautés, en l'occurrence des hindous de basses castes. Près d'un millier d'hectares ont ainsi été illégalement occupés par des sans-terre. Des expulsions parfois violentes, comme en témoignent les maisons en ruine des anciens propriétaires, qui ont dû fuir. Les nouveaux occupants estiment être dans leur droit, puisqu'à l'origine ces terres étaient les leurs, avant d'être accaparées au fil des générations par les hindous venus s'installer à Koraput. Selon les autorités locales, l'organisation qui est à l'origine de ce mouvement tribal, Chasi Mulya Adivasi Sangh (le Cmas, Association des paysans et travailleurs tribaux), serait en fait une officine des naxalistes, la dernière rébellion maoïste d'envergure au monde.
«Pour un verre d'alcool». Ces derniers jours, la zone où les terres ont été saisies n'était d'ailleurs accessible que par des pistes détournées, les rebelles ayant coupé des arbres en travers de toutes les routes à l'occasion de l'une de leurs innombrables grèves générales. Mais si la guérilla déclare soutenir le mouveme