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Libération
Éditorial

Timbre de voix métissée

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publié le 21 novembre 2009 à 0h00

Charles Aznavour peut-il figurer au panthéon des prétendants à l’identité nationale française ? Il a toujours revendiqué ses origines arméniennes, et continue obstinément de joindre sa voix au combat pour la reconnaissance du génocide perpétré par la Turquie contre l’Arménie. Cette voix prodigieuse est-elle finalement bien française ? Par les temps qui courent, certains n’hésiteraient pas à poser cette question aberrante. Il y a fort à parier pourtant qu’elle scandaliserait majoritairement l’opinion hexagonale : la voix d’Aznavour appartient à la France, son répertoire est typiquement français, un point c’est tout. L’intéressé ne partage pas ce credo, convaincu que la culture française relève, comme lui, d’un précieux métissage. N’empêche : à 85 ans, Charles Aznavour est une icône bel et bien française, un monstre sacré qui, certes, passe nos frontières, comme on exporte un patrimoine. Un ambassadeur de notre fière identité nationale…

Ian Fischer, 18 ans, défend son identité nationale à lui, celle des Etats-Unis. Citoyen américain, il combat en Irak, engagé volontaire dans l'armée de son pays. «Quand la patrie est en danger, dit très bien Danton, tout appartient à la patrie.» Ian Fischer ne connaît sans doute pas cette réflexion d'Alfred de Musset, il en a cependant été pénétré. Deux ans durant, Craig F.Walker l'a photographié du camp d'entraînement au front. Où l'on voit un jeune homme soudain pris par le doute, perdre ses illusions patriotiques et finir en cataclys