Stéphane Lathion est président du Groupe de recherche sur l'islam en Suisse auprès de l'Observatoire des religions de l'université de Lausanne. Il décrypte pour Libération les tenants et aboutissants de la votation proposée par l'extrême droite.
Que représente l’islam dans la Confédération suisse ?
Selon le dernier recensement de la population, en 2000, il y avait 4% de musulmans dans le pays ; ils sont probablement 5% aujourd’hui. Les quatre cinquièmes d’entre eux proviennent d’Europe, à savoir des Balkans et de Turquie, ce sont les représentants d’un islam européen et apaisé. Il s’agit d’arrivants récents : les Bosniaques et les Kosovars se sont installés pendant les guerres des Balkans des années 90, même s’il existait déjà une filière d’émigration kosovare en Suisse avant le conflit. Il y a une vraie différence avec les musulmans de France : d’abord parce que les arabophones sont ici une toute petite minorité, ensuite parce qu’il n’y a pas de passif colonial. Enfin, l’intégration se fait sans heurts. Les musulmans ont peu de revendications cultuelles, à part le problème des carrés dans les cimetières - généralement résolu en bonne intelligence avec les autorités cantonales. De plus, comme ailleurs en Europe, les musulmans de Suisse sont peu pratiquants. Hormis le «pic» du ramadan, ceux qui fréquentent régulièrement une mosquée ne dépassent pas 15%.
Pourquoi cette initiative, perçue comme une votation des Suisses sur l’islam ?
Les minarets sont en effet un prétexte. Certains éléments radicaux de l'Union démocratique du centre [UDC, droite xénophobe, ndlr] ont senti qu'il y avait de quoi