Un soir de l'été dernier, Nadia (1) était à Roots, l'un des rares cafés de Gaza où les femmes peuvent fumer la chicha. C'est un endroit chic et cher pour la bande de Gaza, pas un café populaire ouvert sur la rue. Des policiers ont débarqué : «Pas de narguilé pour les femmes, c'est interdit !» Ils ont fermé l'établissement. Le lendemain, les propriétaires ont appelé des connaissances au sein du gouvernement du Hamas au sujet de cette nouvelle réglementation dont personne n'avait jamais entendu parler : c'est une initiative intempestive de policiers faisant du zèle, leur a-t-on répondu. Mais Nadia et son amie n'ont plus eu envie de retourner au café depuis…
Les incidents de ce genre se sont multipliés ces derniers mois, témoignant d’une volonté de plus en plus nette du Hamas de marquer la société de son empreinte. Pendant tout l’été, les plages, l’un des seuls lieux de détente des Gazaouis, ont été le théâtre d’une véritable «campagne de vertu». Des petits groupes de policiers parcouraient le bord de mer pour enjoindre aux hommes de se baigner en tee-shirt et bermuda - cela fait longtemps que les rares femmes qui se baignent le font habillées - et pour vérifier que les couples étaient bien mariés. En septembre, coup sur coup, un responsable du ministère de l’Education édictait un règlement obligeant toutes les collégiennes à se voiler, sous peine d’exclusion, et le responsable de la Cour suprême, nommé par le Hamas, imposait aux avocates de venir voilées au tribunal. T