Le malek (1) Fahim ur-Rehman est un homme en sursis. Il a survécu ces derniers mois à une demi-douzaine d’attaques. A présent, il savoure chaque minute de ses journées. Son village de Matani, dans la banlieue de Peshawar, est lourdement barricadé. Une grande porte en fer rouillée bloque la rue principale. Une fois celle-ci passée, il y a encore une barrière surveillée par des miliciens, kalachnikov en bandoulière. A quelques mètres, un bâtiment porte les stigmates d’un attentat à la voiture piégée : débris de béton, murs balafrés… Le moteur du véhicule a été projeté sur le toit. L’explosion a tué cinq personnes, dont deux enfants. Plus loin, dans une guérite protégée de sacs de sable, des tireurs masqués surveillent les intrus.
Assis sur un lit de corde, Fahim ur-Rehman, la poitrine ceinte d'une cartouchière, soupire : «La semaine dernière, les talibans ont envoyé un commando-suicide dont les membres se cachaient sous des burqas. Heureusement, j'avais été prévenu par les services secrets. Lorsque nous avons repéré ces trois hommes, mes miliciens les ont attrapés et les ont tués.»
Cette année, le malek a levé une lashkar, une milice tribale, pour protéger son fief des attaques de talibans. «Les militants ont essayé de kidnapper plusieurs villageois, alors nous avons dû nous défendre. A présent, j'ai 500 hommes armés de ma tribu qui patrouillent dans le quartier. Et, si besoin, il y en a 1 000 de plus prêts à prendre les armes. Ici, nous savons utiliser une