Pour la première fois depuis le règne du dictateur Ferdinand Marcos (1965-1986), la loi martiale a été imposée vendredi aux Philippines. L’état d’exception couvre l’ensemble de la province de Maguindanao, située dans la partie méridionale du vaste archipel. Durant tout le week-end, l’armée a arrêté des dizaines de suspects soupçonnés d’être impliqués dans le massacre de 57 hommes et femmes le 23 novembre. Une trentaine de journalistes font partie des victimes.
Aux Philippines, où les pouvoirs économique et politique sont presque totalement détenus par des clans familiaux, les élections se soldent généralement par des chapelets de morts. Mais jamais on n'avait compté autant de victimes en si peu de temps- et autant de journalistes tués en une seule fois. L'instigateur du massacre serait Andal Ampatuan Junior, le maire d'Ampatuan, qui porte le même nom que sa ville. Celui-ci escomptait se faire élire sans mal à la place de son père (Andal Ampatuan Senior) au poste de gouverneur. La candidature surprenante d'un rival, Toto Mangudadatu, mit son projet en péril. Les menaces de mort n'eurent pas raison de ce concurrent têtu… Mangudadatu s'embarqua en fanfare le 23 novembre dans un cortège de véhicules à travers la jungle pour déposer sa candidature à la capitale locale. Afin de dissuader Ampatuan de lui tendre une embuscade, il prit la précaution de garnir ce cortège de sa propre femme, de deux de ses sœurs et d'une trentaine de journalistes devant servir de «bouclier humain»