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Libération
Interview

«L’Etat argentin est coupé de l’opinion»

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publié le 10 décembre 2009 à 0h00

Professeur de sciences politiques à l’université Buenos Aires, Isidoro Cheresky, estime que la présidente Kirchner va entrer en conflit avec le nouveau Parlement.

Le gouvernement de Cristina Kirchner est-il de gauche ?

Il y a en Argentine une division et un affaiblissement des identités politiques. Le projet de Néstor Kirchner était de créer une gauche tout en fragmentant le Parti justicialiste. Il a notamment mis le paquet sur les droits de l’homme, n’hésitant pas à rouvrir les procès contre les tortionnaires de la dictature militaire, et il a été très ferme sur la renégociation de la dette extérieure. Jusqu’à l’élection de Cristina, en 2007, on était dans le cadre d’un mouvement composite de partis qui incluait les associations de droits de l’homme et le syndicalisme de gauche. Les Kirchner ont incontestablement rétabli l’autorité présidentielle, repolitisant la fonction et redonnant une place à l’action de l’Etat face aux militaires, à l’Eglise, aux syndicats et aux patrons. Mais les «K» ont peu à peu concentré de très grands pouvoirs. Le gouvernement actuel est très personnaliste. Il agit de façon jacobine, arbitraire et coupée de l’opinion.

Quel rôle joue la mobilisation de rue dans la politique actuelle ?

La rue est fréquemment aux mains des opposants. La très forte mobilisation des campagnes contre les taxes sur les exportations de produits agricoles, l’an dernier, et plus exactement sur l’utilisation des fonds récoltés, a constitué la vraie rupture avec le pouvoir central. Le Parti justicialiste a commencé à craquer et les gouverneurs de provinces ont lâché les Kirchner. Ce conflit a trouv