La première bombe a explosé ici, dans une salle de classe du rez-de-chaussée. La déflagration a creusé un trou dans le sol, détruit une partie des murs et secoué tout le bâtiment. Heureusement, en cette froide nuit de novembre 2008, les professeurs et les élèves de l'école primaire pour filles du quartier de Kambar dormaient chez elles à poings fermés. Shirin, institutrice de l'école, au visage fatigué où sont plantés deux yeux noisette, avoue que le lendemain matin, elle n'a pas eu le courage de venir voir les dégâts. «Je suis restée chez moi, j'étais terrifiée, murmure cette femme entre deux âges. Mes collègues sont allées sur place, elles sont revenues en pleurant. Pourtant, nous venions toutes à l'école en burqa comme les talibans nous l'avaient demandé.»
Shirin vit depuis toujours à Mingora, la grande ville de la vallée de Swat. Mère de cinq enfants, elle enseigne l'ourdou, la langue nationale, aux générations d'écolières de Kambar. Jusqu'en avril, cette localité était encore le fief du mollah Shah Doran, l'un des bras droits du chef des talibans de Swat. «Shah Doran était épicier dans le quartier avant de rejoindre les terroristes, se souvient l'enseignante. Il vient d'une famille respectée. Mais aujourd'hui, ses proches l'ont renié, ils ne veulent plus entendre parler de lui.»
Des fissures géantes
A Kambar, après l'attentat dans l'école, les parents ont préféré garder leurs enfants à la maison. Mais les talibans s'acharnent. Qu