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Libération
Reportage

Confusion des secours en Haïti, pays sans tête

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Etat absent, coordination balbutiante… Alors qu’à Port-au-Prince, l’aide peine à s’organiser, les habitants de certaines zones craignent de ne jamais la voir arriver.
publié le 18 janvier 2010 à 0h00

Jusqu’à jeudi, Fritzner Decimus a entendu sa femme, coincée sous une énorme dalle de béton effondrée de leur maison, l’appeler à l’aide. Vendredi, plus rien. Samedi, l’attente. Jusqu’en fin de matinée, lorsqu’il a vu une voiture chargée de Blancs avec des casques de pompiers et des chiens. Il a envoyé son beau-frère les rattraper. Une demi-douzaine de Français, qui passaient par là en mission de reconnaissance dans le quartier Sainte-Marie, de la commune de Canapé-Vert. Personne n’était encore passé là-haut, dans ce vallon boisé aux pentes abruptes. Depuis la crête, il y a l’une des plus belles vues sur la baie de Port-au-Prince : le bleu du ciel, le vert tendre des arbres et la ville qui descend voluptueusement vers la mer. De là, on ne distingue pas l’ampleur des destructions… Les secouristes français, des sapeurs-pompiers professionnels venus de Lyon et de Nice par leurs propres moyens, ont ausculté le bâtiment au vibrascope. Rien à faire, pas âme qui vive.

«Elle semble morte. En tout cas, elle ne réagit plus, déplore le chef du détachement, Patrick Villardry. On ne peut pas percer une dalle aussi lourde sans la certitude de sauver une vie. Le temps presse.» Fritzner Decimus retient ses larmes avec peine, comme si c'était maintenant que tout s'effondrait, en silence et à l'intérieur. Il a tout perdu : sa femme Mirlène, son frère, sa sœur, sa maison, son logement : la douane du port s'est effondrée, tout le pâté de maison a glissé le long de la pente. De j