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«La situation d'urgence à Haïti sera beaucoup plus longue qu'après le tsunami»

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Chercheur à l'IRD (Institut de recherche pour le développement) et fondateur de l'Observatoire de l'action humanitaire, Marc-Antoine Pérouse de Montclos analyse la gestion de la crise humanitaire à Haïti par la communauté internationale à la lumière du précédent du tsunami en Asie, fin 2004.
Un Casque bleu jordanien distribue de l'aide à des déplacés haïtiens, le 18 janvier 2010 à Port-au-Prince (AFP Logan Abassi)
publié le 19 janvier 2010 à 14h28
(mis à jour le 19 janvier 2010 à 14h30)

Quelles sont les spécificités du drame à Haïti par rapport au tsunami de 2004?

Il y a très peu de survivants lors d'un raz-de-marée, à la différence d'un séisme. La situation d'urgence à Haïti sera donc beaucoup plus longue que lors du tsunami de 2004. Secundo, le contexte politique est radicalement différent: en Asie, on était en présence d'États solides. L'un d'entre eux, l'Inde, a même refusé l'aide internationale. Sur le terrain, les ONG et les agences internationales pouvaient s'appuyer sur des relais locaux. A Haïti, on est face à un État faible, pour ne pas dire déliquescent. Il manque un interlocuteur pour coordonner l'aide. Enfin, seul le littoral des États concernés avait été touché.

N'êtes-vous pas frappés par l'engorgement de l'aide?

Il n'y a rien d'anormal à cela. On est dans un pays sous-développé et on ne peut pas faire de miracle avec une piste unique sur le principal aéroport du pays. On a vécu la même situation à Aceh lors du tsunami. Et ce problème de coordination de l'aide étrangère risque de durer. Sur le papier, l'ONU a, en effet, la légitimité et l'efficacité nécessaire pour mener à bien ce travail de coordination. Mais nombre d'ONG veulent s'affranchir de sa tutelle, considérant que les Nations unies sont avant tout une organisation d'États, qui ont chacun leurs intérêts. Par ailleurs, les Nations unies disposent d'une force sur place (la Minustah) qui est autorisée à tirer et à tuer s'il le faut... On est donc en présen