Le commissaire Gédéon, responsable de «la juridiction centrale» de la capitale, est catégorique : «La vie reprend ses droits», presque trois semaines après le tremblement de terre qui a réduit Port-au-Prince à un amas de décombre. La vie ? «Oui, les bandits sont de retour, quelques bordels de Pétionville ont rouvert et ces dames ont repris le travail à l'angle de mon commissariat.» Ces premiers symptômes furent, il y a environ trois jours, cinq incendies dans la rue du Centre et dans les rues perpendiculaires au boulevard Dessalines qui conduit à la mer. «Les pillards ne trouvant rien mettent le feu aux immeubles encore debout», explique le commissaire.
Les hommes du commissariat du quartier de la Saline patrouillent dans un 4 x 4. On dirait cinq bons copains partis de bon matin à la chasse. Ils tombent sur un adolescent avec un pot de graisse qui sort en rampant d'un immeuble. Ils le battent et l'obligent à se couvrir le visage de graisse. Le type est sûr qu'il va mourir dans la poussière et sa pisse coule du trottoir. Ils ricanent et font mine de lui mettre des coups de crosse de fusil à pompe dans la figure. Et puis l'embarquent. Le commissaire Gédéon, un homme charpenté à la mise parfaite dans son uniforme, explique que l'heure, «naturellement», n'est pas à la procédure ni aux interrogatoires. «On a fait une descente à Martisan, une zone rouge de la ville. On savait que cinq chefs de gang échappés du pénitencier suite au tremblement