Pour la seconde fois depuis la chute de Saddam Hussein, les Irakiens élisent leurs députés. Un scrutin d’autant plus important qu’il intervient à quelques mois du retrait des troupes de combat américaines. Chercheur au CNRS, spécialiste de l’histoire contemporaine de l’islam dans les pays arabes (1), Pierre-Jean Luizard en fixe les enjeux.
La guerre confessionnelle qui a ensanglanté l’Irak entre 2005 et 2008 est-elle terminée ?
Non, elle se poursuit, mais sous des formes différentes. La violence continue, on l'a vu lors des attentats sanglants contre les pèlerins chiites en marche vers Kerbela [ville sainte du centre du pays, ndlr], en février. Cependant, il y a une baisse spectaculaire des attaques, notamment antichiites, due en partie à la séparation des deux communautés. Les chiites ont gagné la bataille de Bagdad : les sunnites ne représentent plus qu'à peine le quart de la population. Les quartiers mixtes ont quasiment disparu et des murs de béton séparent les quartiers en guerre. Par ailleurs, l'ascension des «conseils de réveil» [formés par des insurgés retournés par les Américains et chargés de la sécurité de leur district] au sein de la communauté arabe sunnite, aux dépens des jihadistes, a modifié la donne : désormais, les sunnites cherchent à s'intégrer dans le système politique qu'ils combattaient naguère. Leur combat est à présent davantage électoral, même si la tentation de la violence demeure. En face, les milices chiites, enco