Le charbon. Son odeur âcre et pénétrante, ses terrils monstrueux qui surgissent dans le paysage ocre, sa couleur noire maculant les vallons de glaise taillés à la serpe pour faire passer les routes et la noria de camions chargés de poussière noire. Cet après-midi-là, dans ce coin perdu du Shanxi, l’anthracite strie le visage tourmenté de Xiao Shihong, 38 ans. Sous ses pieds, dans la mine, son mari, ses deux beaux-frères et des dizaines d’autres mineurs sont en train de mourir. Ils seraient 153, disent les officiels dont les longues voitures noires et les 4 x 4 de luxe sont parqués devant le puits de la mine d’Etat. Davantage, 200 peut-être, affirment des rescapés de l’inondation soudaine qui a envahi les galeries dimanche vers 14 heures.
«Je n'ai rien dit à mes trois enfants, pour qu'ils ne sachent pas. Du moins pas encore.» Xiao Shihong a peu d'espoir, beaucoup de larmes, et des paroles sans fard pour les dirigeants de la mine d'Etat. Elle a tenté de les approcher, pour leur expliquer qu'ils devaient faire le maximum, sauver les trois membres de sa famille qui agonisent là-dessous, dans les boyaux submergés, à plusieurs centaines de mètres sous terre. Ils l'ont ignorée, avec dédain, presque avec colère. «Ce sont des corrompus, dit-elle. Ils ont empoché l'argent devant servir à la sécurité, et voilà le résultat.»
Dans leurs cahutes en préfabriqué où ils logent à huit sur quelques mètres carrés, les mineurs résignés ne disent pas autre chose. «Il