Son regard est celui d'un homme qui restera hanté pour le reste de sa vie. Samuel, 39 ans, a assisté à des réunions présidées par d'importantes personnalités politiques pour distribuer des armes aux milices et lancer des appels à la haine. Ces rassemblements, raconte-t-il, ont commencé début 2007 et avaient pour but de planifier les violences qui ont suivi l'élection présidentielle kényane de la fin 2007, qui ont vu la réélection de Mwai Kibaki et ont fait 1 500 morts et 300 000 déplacés. Mardi, la Cour pénale internationale de La Haye a officiellement ouvert deux enquêtes en dénonçant les «réticences» des autorités kényanes à propos de ces violences. «Nous étions tous obligés d'y aller. Si nous refusions, nous étions battus. J'ai vu… des bébés se faire découper à la machette. J'ai vu cela. Une femme violée par cinq hommes. Elle en est morte. Je connais ceux qui ont fait cela… J'ai une liste d'au moins soixante personnes», assure Samuel qui, prenant sa tête entre ses deux mains, la secoue lentement de droite à gauche.
Animal. Depuis qu'il a décidé de témoigner sur les horreurs auxquelles il a participé, sa vie est devenue celle d'un animal traqué. Il vit des maigres ressources que lui procurent des ONG, dans des hôtels, sans pouvoir remettre un pied dans son village. Il a accepté de nous parler à visage découvert car, même s'il vit dans la peur d'être assassiné, il ne caresse plus qu'un seul espoir désormais, que la justice soit faite. Son cas n'est