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Libération
TRIBUNE

Obama, stratège patient dans un monde d’impatiences

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par Hubert Védrine, ancien ministre des Affaires étrangères
publié le 29 avril 2010 à 0h00

Alors même que le président Obama a entrepris de sortir l’Occident de l’impasse Bush, l’Europe paraît curieusement absente.

Jusqu'en 2008 presque personne en Europe n'osait croire que les Américains puissent élire un «Noir» (en fait un métis). Peu avaient lu l'admirable discours de Philadelphie par lequel le candidat Obama s'affirmait «post-racial». Après son élection, ils se sont enthousiasmés : «Extraordinaire ! Ils ont élu un Noir !» En fait le plus saisissant est que les électeurs américains, cherchant le meilleur pour les sortir de la crise, aient élu… un intellectuel, un réaliste très intelligent, doté d'une vision globale du monde. Barack Obama est en avance sur son électorat, pour ne rien dire des républicains, qui se crispent dangereusement face au défi multipolaire.

Les opinions européennes ont vu en Obama un Européen post-historique et multilatéral. Malentendu de groupies ? En fait, il est tout à fait américain, enrichi par l’Asie et l’Afrique, pas par l’Europe, président des Etats-Unis, pas du monde. C’est clair : l’Europe n’est pour lui ni un problème (tant mieux) ni une solution (dommage, mais c’est de notre fait). Il n’a pas l’obsession des commémorations qui a saisi l’Europe depuis qu’elle doute de son avenir. Obama n’avait pas de raison impérative d’aller à Berlin, ni de participer à des sommets sans enjeu. Il a d’autres priorités. Inutile de se vexer. Le temps devrait être passé de l’époque où nous dépendions des projets des Américains à notre sujet.