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Libération
Récit

Lignes de guerre

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Des reporters largués au cœur de l’action au Vietnam ou confinés dans une unité en Irak… la couverture des conflits a changé. Fresque hallucinée contre récit intime, deux livres en témoignent.
publié le 15 mai 2010 à 0h00

C'était dix ans jour pour jour après la chute de Saïgon et Libération évoquait, en guise d'anniversaire, les lendemains qui déchantent dans un Vietnam soviétisé. «Putain de paix…» : ce titre barrait la une, clin d'œil à un livre devenu un monument sur la guerre du Vietnam : Putain de mort. Le titre original était nettement plus sobre : Dispatches - dépêches, car il s'agissait des chroniques du journaliste Michael Herr, envoyé spécial du magazine Esquire, qui fit deux longs séjours au «Nam» entre 1967 et 1969. Une prose déjantée sur fond de musique rock et pleine du bruit des rotors des hélicoptères et des fracas des bombes au napalm. Un long trip de sang et de mort écrit à la première personne, dans la mouvance du new journalism des années 60. «Vous pouviez mourir écrasé brutalement dans une fournaise, votre hélico tombé comme un poids mort, vous pouviez exploser de telle sorte que l'on ne retrouve jamais les morceaux, vous pouviez prendre une balle dans le poumon proprement et partir en n'entendant plus que le gargouillis de vos derniers soupirs, vous pouviez mourir au dernier stade de la malaria avec des battements lointains dans les oreilles, ce qui pouvait vous arriver après des mois de fusillades, de roquettes, de mitrailleuses», écrit Michael Herr.

Ennemi invisible

Dès sa première publication en 1977, ce récit d'une guerre démente où l'Amérique, malgré toute sa puissance, connut sa première défaite,