Le docteur Eric Piel, ancien chef de secteur en psychiatrie à l’hôpital d’Esquirol (Val-de-Marne), vient de passer plusieurs semaines à Haïti pour une mission de Médecins sans frontières (MSF) sur les troubles psychiques faisant suite au tremblement de terre.
S’occuper de santé mentale après une catastrophe comme un tremblement de terre, est-ce bien nécessaire ?
C’est en tout cas nouveau. Depuis quelques années, les organisations non gouvernementales se sont rendu compte qu’il fallait aussi prendre en charge les troubles psychiques. Pour la bonne raison que les traumatismes, liés à la guerre mais aussi à des phénomènes de catastrophes naturelles, existent bel et bien. MSF a envoyé des psychologues et deux psychiatres. Mais c’est vrai que les autres ONG restent encore un peu méfiantes.
Qu’avez-vous pu voir et faire ?
C’était très impressionnant. On a été confrontés à des troubles de l’humeur, d’angoisse, mais aussi à une hypervigilance. Et surtout ces troubles peuvent durer longtemps, des semaines si on ne leur porte pas attention. En revanche, à partir du moment où on les diagnostique, où l’on se met à parler avec les personnes, en deux, trois consultations, cela peut se régler.
Cela touche beaucoup de monde ?
Oui, beaucoup. Nous étions organisés avec deux psychiatres expatriés, et huit psychologues haïtiens. Nous travaillions ensemble, soit dans un des hôpitaux de MSF, soit en allant dans certains lieux. Et beaucoup de monde venait. La grande majorité venait pour des troubles, légers, mais bien réels, qui nécessitaient une attention. Un petit tiers était en revanche très profondément touché : cela pouvait être une attitude d’indifférence tota