Ici la pauvreté a effacé les couleurs. Sur la Aandblom street à Vrededorp, un quartier à l'ouest de Johannesburg dont le nom signifie «le Village de la paix», les enfants blancs jouent avec les enfants noirs, devant de tristes maisons aux façades abimées. Les hommes sont assis à côté de leurs voitures rouillées. «Avant, il n'y avait que des blancs ici», lâche Charles, qui change les pneus de sa vieille Toyota avec ses deux fils, «mais aujourd'hui c'est très divers, et on fait au mieux».
Charles et ses deux fils. (photo: Jérôme De Perlinghi)
Durant longtemps en réalité, Vrededorp a fait office d'exception. Avec ses boutiques et ses commerces, l'endroit avait attiré de nombreuses communautés, notamment indiennes et malaisiennes, dans les années 50 et 60.
Mais en 1968, le régime d'apartheid a décidé d'en faire une zone résidentielle exclusivement réservée aux blancs et de leur construire des lotissements. Les maisons ont été détruites à coups de bulldozers, et les populations non blanches ont été expulsées. Le gouvernement n'est cependant jamais allé au bout de son projet, délaissant Vrededorp au bout de quelques années. Dès la fin de l'apartheid, les «colored» (métis) et les populations noires sont venus s'y installer, attirés par les faibles prix de l'immobilier.
Sur un terrain vague, un groupe de jeunes noirs fument des cigarettes avant d'aller au lycée du coin. Un peu plus loin, Boss Boy, casquette sur la tête et visage marqué par l'âge, promène so