Ce matin-là, il pleuvait. C’était le 20 avril 1975, à Phnom Penh, au Cambodge. Un petit groupe de femmes, d’enfants et d’hommes passaient les grilles de l’ambassade de France pour monter dans une jeep et deux camions bâchés. Trois jours plus tôt, les Khmers rouges avaient fait main basse sur la capitale cambodgienne et renversé le régime pro-américain de Lon Nol. La terreur s’installait au Cambodge. Les Khmers rouges traquaient les «traîtres fascistes et les suppôts de l’impérialisme». La dizaine de Cambodgiens qui quittent l’ambassade de France ce matin-là, sont de ceux-là. Il y a le prince Sirik Matak et ses deux gardes du corps, la princesse Manivane, sa fille, son gendre et ses deux petits-enfants, ainsi que Loeung Nal, le ministre de la Santé et Ung Boun Hor, le président de l’Assemblée cambodgienne. Aucun n’est revenu.
C'est sur la disparition de ce dernier que la justice française va de nouveau enquêter. Après une dizaine d'auditions de témoins et trois années d'interruption, le tribunal de Créteil vient de rouvrir le dossier. Un nouveau magistrat, le quatrième en onze ans, a été nommé : Emmanuelle Ducos devra élucider le rôle de l'Etat français dans cette affaire. «L'enquête devra déterminer les responsabilités de tous. Celle des Khmers rouges est évidente,note maître Patrick Baudouin, qui défend la veuve du président de l'Assemblée cambodgienne, Billon Ung Boun Hor, et qui a rencontré l'an dernier, à Phnom Penh, Marcel Lemon