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Interview

Roland Marchal : «Au lieu d’affaiblir les Shebab, on les a renforcés»

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Roland Marchal, spécialiste de la Somalie, analyse l’échec de la stratégie occidentale :
publié le 13 juillet 2010 à 0h00

Roland Marchal, chargé de recherches au CNRS, enseigne à Sciences Po Paris et à l’université Paris-I. Il est le meilleur spécialiste de la Somalie en France.

Qui sont les Shebab ? D’où viennent-ils ?

Ce mouvement à une triple origine. C’est important de le souligner car les Occidentaux ne mettent l’accent que sur la dimension internationaliste, liée à Al-Qaeda. Il y a bien un groupe de Somaliens ayant fait ses armes en Afghanistan et qui, de retour au pays après la chute des talibans fin 2001, était décidé à mettre en œuvre ce qu’il avait appris. En termes numériques, les deux autres groupes sont plus importants. Il s’agit des islamistes salafistes d’Al-I’tissam, une formation issue de la scission d’Al-Ittihad, la matrice des mouvements islamistes somaliens dans les années 90 : leur agenda a toujours été intérieur. Le troisième pilier des Shebab est formé des jeunes recrutés et instruits par les tribunaux islamiques pour appliquer leurs jugements et transcender les divisions claniques. Ces trois tendances ont fusionné au deuxième semestre 2004 pour former un groupe peu influent et peu connu à l’époque.

Qu’est-ce qui explique une montée en puissance aussi fulgurante ?

La politique occidentale menée par les Etats-Unis, par leur meilleur allié régional qu'est l'Ethiopie, mais aussi par l'Europe - à commencer par la France et la Grande-Bretagne -, a eu un effet catastrophique. Elle a réussi à transformer une organisation groupusculaire en une force