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Istanbul, les yeux derrière l’eunuque

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[Harem]. Hachim, le détective du XIXe siècle créé par Jason Goodwin, nous emmène dans les intrigues du palais impérial de Topkap?, devenu un musée très visité.
publié le 17 juillet 2010 à 0h00

C’est une cour étroite, enserrée entre deux bâtiments d’un étage aux fenêtres couvertes de grilles, où le soleil ne pénètre qu’à son zénith. A l’une de ses extrémités, une lourde porte de bois et de bronze donne sur la deuxième cour du palais, celle des «cérémonies» avec ses pavillons aux murs étincelants de faïences - celui des requêtes, la tour de la justice, la salle du Conseil- et les immenses cuisines aux vingt cheminées. De l’autre côté, un couloir mène vers le harem.

Cet entre-deux est le règne des eunuques. Ils montent la garde et portent les plats. Hachim Togalu est l'un d'eux, un eunuque blanc, sans testicules, mais non totalement privé de membre viril, à la différence des esclaves noirs dévolus à la garde des femmes. Ce lettré lucide est le protégé de lavalide sultan, la mère du sultan Mahmud II, «ombre de Dieu sur Terre et commandeur des croyants». Chez les Ottomans, comme auparavant à Byzance ou dans la lointaine Chine, les eunuques sont l'incarnation même de l'Etat. «Une étrange confrérie, celle d'hommes privés d'attributs qui, depuis la nuit des temps, s'étaient tenus à l'écart pour mieux observer et servir. Ils regardaient les remuantes fourmilières de l'humanité à l'abri des soucis qui la dévorent : concupiscence, longévité et perpétuation», écrit Jason Goodwin (lire ci-contre).

Cet historien britannique, spécialiste de l'empire ottoman, a fait de Hachim le personnage central d'une série de polars se déroulant dans les année