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Spinoza à Rijnsburg

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[Un penseur, un lieu]. Toute la semaine, une ville qui a vu prospérer un philosophe. Un jeune opticien juif excommunié ouvre le bal aux Pays-Bas.
publié le 19 juillet 2010 à 0h00

Un certain Ogier Ghislain de Busbeck, ambassadeur de l’empereur d’Autriche, le découvre, dit-on, dans les plantations du sultan Soliman le Magnifique, en achète quelques centaines de bulbes et les envoie à Cornelius Clusis, responsables des jardins impériaux. Muté à Leyde, celui-ci les plante en terre batave. Et la Hollande devient le pays des tulipes. Aujourd’hui, avec Aalsmeer, Rijnsburg est l’un des plus grands centres de floriculture et de vente au cadran néerlandais. Tous les ans, le 18 août, part de là et va lentement vers Leyde un chatoyant défilé de chars fleuris. La petite ville, pratiquement collée à Katwijk, station de la mer du Nord, compte moins de 15 000 habitants.

«Horribles hérésies», «actes monstrueux»

Baruch Spinoza arrive à Rijnsburg en 1660. Il a 28 ans, et n’a encore rien publié. Il a vécu à Amsterdam, qui connaissait alors son âge d’or, financier, industriel, culturel, et, à l’école de la communauté juive portugaise, a étudié le premier Testament, le Talmud et la Kabbale. Il a fréquenté les cours de Franciscus Van den Enden, libre penseur et ex-jésuite, dont le salon accueillait des libertins et des chrétiens libéraux. C’est là qu’il s’est consacré aux sciences et aux mathématiques, appris le latin, lu Descartes, tout en aidant son père à tenir sa maison d’import-export de fruits secs et d’huile d’olive.

On ne sait pas très bien ce que le jeune Spinoza a pu dire ou écrire qui soit parvenu au conseil directeur de Beth Jacob et des parnassim