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Libération
Interview

«En Afrique centrale, on envoie des enfants-sorciers en prison»

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Questions à Aleksandra Cimpric Anthropologue
par Pauline André
publié le 21 juillet 2010 à 0h00

Aleksandra Cimpric, anthropologue slovène, est l’auteur du rapport de l’Unicef sur les «enfants accusés de sorcellerie» en Afrique centrale et en Afrique de l’ouest. Un phénomène qui s’accentue dans les zones de guerre.

Comment naissent ces accusations ?

Elles surviennent en général à la suite d'un événement malheureux : maladie, échec, mort. La famille cherche un coupable. Un pasteur-prophète ou un tradipraticien doit confirmer cette suspicion. Mais dans certains cas, la famille n'attend pas pour exercer des violences sur l'enfant. Comme ce jeune garçon, accueilli par une famille de Bangui [capitale de la République centrafricaine, ndlr] après la mort de ses deux parents. Accusé d'avoir tué son oncle, alors que ce dernier est tombé d'un arbre, il a été battu jusqu'à avoir les bras cassés et le crâne ouvert. La famille exerce ainsi sur lui une pression pour qu'il avoue et qu'il corrige son «crime».

Dans votre rapport vous évoquez le business des pasteurs-prophètes. De quoi s’agit-il ?

Cela varie d’une Eglise à l’autre, d’une région à l’autre. Certains pasteurs ont compris, notamment en RDC, que ce type d’exorcisme pouvait rapporter gros et se sont spécialisés dans la chasse aux sorciers. Dans les Eglises prophétiques, la «délivrance» a lieu pendant la messe, en présence des fidèles. A la fin de son prêche, le pasteur interpelle l’assemblée, demandant aux familles de témoigner. Les médecins traditionnels en profitent aussi et se font pay