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Libération

En quête de Barcelone

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[Apéro]. Le détective Pepe Carvalho investigue. Dans la ville espagnole, ses marchés colorés et ses bodegas, il cherche des indices sur son gourmand créateur, Manuel Vázquez Montalbán, mort en 2003.
publié le 31 juillet 2010 à 0h00

Pour saluer l'apéro de midi, Santa Maria del Pi, belle figure d'un gothique catalan austère et sans apprêts, a toujours un temps d'avance sur les autres paroisses du voisinage. Cette ronde sonore des cloches, Pepe Carvalho l'appréhende machinalement en s'asseyant au Glaciar, dans un des angles sombres de la Plaza Real. C'est un bar à quelques mètres des ramblas où le détective a son bureau. Sur cette agora à arcades - qui atteint des proportions idéales, sans chercher à rivaliser avec l'architecture grandiloquente des places royales de Madrid ou Salamanque, et résume bien Barcelone, grande ville mais petit monde -, l'établissement a gardé de vrais garçons qui savent que boire impose quelques rituels.

Dans les cafés voisins, le personnel est devenu largement asiatique. Ce qui donne des serveurs et des serveuses d'abattage, rapides, efficaces, mais certainement pas des camareros dignes de ce nom, capables de vous entretenir savamment de la dernière corrida qu'ils n'ont pas vue, de vous conseiller ou déconseiller, par exemple en cette période caniculaire, de prendre une bière à double fermentation. Pepe se demande ce que son géniteur, l'écrivain Manuel Vázquez Montalbán, toujours attentif aux transformations sociales de sa ville, aurait pensé de cette arrivée massive des Asiatiques dans la restauration, cet art qu'il portait aux nues, s'il n'était pas mort, un lamentable jour d'octobre 2003, curieusement à Bangkok.

Pepe Carvalho doit bien reconnaître que, depuis