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Le Japon, laboratoire de la déception démocratique

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par Jean-Marie BOUISSOU, Directeur de recherches à Sciences-Po (Ceri, centre d'études et de recherches internationales
publié le 20 août 2010 à 0h00

Le 30 août 2009, la victoire du Parti démocrate japonais (PDJ) a été saluée comme un progrès décisif pour une démocratie que l’absence quasi complète d’alternance depuis 1955 faisait souvent considérer comme imparfaite. Le clientélisme effréné du Parti libéral démocrate (PLD) au pouvoir semblait également éloigné de l’idéal démocratique. Cela n’a pas empêché le Japon de connaître jusqu’en 1990 une croissance exceptionnelle, dont les fruits étaient mieux partagés qu’ailleurs. En Asie, où les démocraties étaient rares, l’archipel faisait ainsi beaucoup pour en défendre le prestige.

Las. Depuis vingt ans, la démocratie s’est avérée incapable de sortir le Japon de la crise économique. Dix-neuf Premiers ministres se sont succédé. Un seul, Junichirô Koizumi (2001-2006), a eu le temps et la volonté d’imposer des réformes ; mais elles ont creusé les inégalités et précarisé la société. L’alternance a été accueillie avec espoir, mais elle a déçu : la popularité du Premier ministre Hatoyama s’est effondrée en huit mois, l’acculant à la démission, avant que le PDJ subisse une sévère déconvenue aux élections sénatoriales de juillet.

Le Japon paye la longue confiscation du pouvoir par le PLD. L’alternance est vitale pour la démocratie. En son absence, beaucoup de sièges parlementaires étaient devenus de véritables fiefs héréditaires. Les trois derniers chefs de gouvernement PLD, tous fils ou petits-fils de Premiers ministres, ont montré à quel point ceux qui héritent du pouvoir au lieu de l