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Libération
Reportage

Terre promise dans la pampa

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Un siècle sépare «le Moïse d’Amérique» de l’actuel roi du soja argentin. Des 50 000 juifs européens, partis coloniser la campagne à la fin du XIXe, il n’en reste que quelques-uns.
publié le 18 septembre 2010 à 0h00

Gustavo Grobocopatel reçoit dans son bureau, au dernier étage de la Bourse aux céréales située dans le «microcentro», le cœur des affaires de Buenos Aires. En bras de chemise et col ouvert, il affiche un sourire avenant sur une barbe de cinq jours. Le regard pétillant, qui illumine les rondeurs de son visage, est attiré par l'ordinateur portable sur lequel défilent les cours du grain en temps réel. A 49 ans, Gustavo préside Los Grobo Agropecuaria SA, l'entreprise familiale qui exploite 250 000 hectares en Argentine, au Brésil et en Uruguay, et exporte plus de 2,5 millions de tonnes de grains chaque année. Sans compter les dizaines de milliers de têtes de bétail à l'engraissement, son millier d'employés, ses moulins à farine et ses activités dans le courtage, les biotechnologies ou le transport maritime. Il y a une vingtaine d'années, les Grobo ont surtout été les pionniers de l'introduction industrielle du soja dans la région de Carlos Caseres (province de Buenos Aires), pourtant jugée trop froide pour une telle culture par les experts agricoles. Aujourd'hui, la firme en exporte plus de 750 000 tonnes, notamment en Chine où la demande est insatiable.

Deuil tragique

Le «roi du soja», comme on le surnomme avec respect sur les rives du Rio de la Plata, est issu d'une famille de gauchos judíos (en référence aux gauchos, les cow-boys de la pampa), ces immigrants juifs chassés par les pogroms d'Europe centrale et devenus agriculteurs dans le Nouveau Monde. Fuya