Pour ses 74 ans, le maire de Moscou, Iouri Loujkov, s’est offert un bain de foule. Depuis deux semaines, il fait l’objet d’une campagne de diffamation sur les chaînes publiques. Indéboulonnable depuis 1992, réélu, renommé, il est aujourd’hui sur la sellette, tant il semble avoir épuisé la patience du pouvoir.
Depuis le 10 septembre, les chaînes de télévision NTV, Rossia 1 et Rossia 24, au service du Kremlin, rivalisent d’inventivité et de mauvais esprit pour dénoncer le maire népotiste et sa richissime épouse, Elena Batourina. Elles accusent Loujkov de préférer ses abeilles à ses administrés et Batourina d’avoir profité de sa position de première dame municipale pour transformer la capitale en chasse gardée de sa compagnie de travaux publics, Inteko. A l’écran, les époux gèrent Moscou comme leur domaine personnel, récompensent grassement leurs fidèles vassaux et n’hésitent pas à user de la violence physique contre leurs détracteurs.
Ces sujets de qualité médiocre, concoctés en quelques heures à partir d'images parfois vieilles de dix ans, ne prennent pas la peine de maquiller leur mobile : discréditer, sur commande, le couple Loujkov. Le contenu importe peu, pas plus que les forfaits réels ou fantasmés du maire. Ce qui compte, c'est le message envoyé : le maire de Moscou est désormais dans le collimateur du Kremlin, décidé, semble-t-il, à s'en débarrasser. «C'est un point de non-retour. La cible d'une campagne télévisée sait qu'elle n'a plus la possibilité de s'arranger à