C'était promis, juré : Haïti serait une priorité dans les esprits de chacun. Personne ne l'oublierait, depuis le tremblement de terre de ce 12 janvier 2010 qui avait anéanti cette île déjà réduite à pas grand-chose. Certains ont tenu leur promesse, revisitent les lieux du désastre. D'autres ont simplement choisi de ne pas les quitter. L'écrivain Yannick Lahens, haïtienne, est de ceux-là, et son livre, Failles, est le plus beau serment fait à un peuple maltraité depuis deux siècles : Failles, au pluriel, car pour Yanick Lahens la faille géologique a révélé les autres failles auxquelles les Haïtiens se sont résignés : «Je ne connais pas de faille historique et sociale plus grande que celle-là en Haïti», «Livrée, déshabillée, nue, Port-au-Prince n'était pourtant point obscène. Ce qui le fut c'est sa mise à nu forcée. Ce qui fut obscène et le demeure, c'est le scandale de sa pauvreté». Yanick Lahens déteste la compassion. Et, même si elle décrit avec une triste minutie les événements qui ont ravagé son pays, elle refuse le cliché qu'il existerait des pays maudits, et chasse les «àquoibonistes», selon l'expression empruntée à Gainsbourg. Elle regrette l'essoufflement prévisible de l'élan solidaire pour mieux le récuser : «L'aide ne fait pas sortir de la pauvreté. Ce bouche-à- bouche artificiel n'a jamais réanimé aucune société malade du sous-développement.» Reste la créativité. René Char y voyait «la santé du malheur». Elle y croit du
Éditorial
Retour en Haïti
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publié le 2 octobre 2010 à 0h00
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