Dans les rues silencieuses, les magasins sont fermés, les véhicules absents et les check-points omniprésents. Tous les matins, des véhicules blindés circulent à Srinagar, la capitale d'été (à majorité musulmane) du Cachemire indien, pour annoncer la reconduite du couvre-feu, imposé pour empêcher toute manifestation séparatiste et anti-indienne après les violences de ces derniers mois. «Quiconque sort dans la rue se fera tirer dessus», annoncent sans vergogne les haut-parleurs. «Le Cachemire est devenu une prison, résume Abdoul Majid, instituteur. Hier, c'était le mariage de deux de mes sœurs. Nous attendions 200 invités, mais seule une vingtaine a pu venir. Les autres ne pouvaient pas sortir, et ceux qui ont tenté se sont fait tabasser par les flics. On n'a plus de vie ici.»
Secouée depuis la mi-juin par le plus grand soulèvement populaire de ces vingt dernières années, la seule province à majorité musulmane de l’Union indienne vit en état de siège. L’activité économique est suspendue, les écoles et universités sont fermées, les médicaments manquent, la justice n’opère plus, et les médias ont le plus grand mal à travailler. Tout a commencé le 11 juin, lorsqu’un adolescent de 17 ans a été tué par un tir de grenade lacrymogène pendant une manifestation indépendantiste. Une bavure qui a provoqué de nouvelles manifestations, débouchant sur d’autres bavures… Un engrenage infernal, qui a déjà coûté la vie à au moins 110 personnes, en grande majorité des j