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Libération
Interview

Corée du Nord «Partir ou mourir d’épuisement»

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La journaliste américaine Barbara Demick a suivi des Nord-Coréens réfugiés au Sud. Au travers de vies ordinaires, se dessine l’effondrement d’un pays.
Une Nord-coréenne et son père sud-coréen le 4 novembre 2010, lors de rencontres familiales temporaires, autorisées par les deux pays. (REUTERS)
publié le 27 novembre 2010 à 0h00

Pendant huit ans, Barbara Demick, journaliste américaine du Los Angeles Times, a suivi une dizaine de Nord-Coréens qui ont fui leur pays et leurs proches pour rejoindre la Corée du Sud (1). Tous sont originaires de Chongjin, la troisième ville du pays, sinistrée par la famine des années 90 qui a fauché près de 2 millions de personnes. Assommés par la propagande et la misère, ils ont vécu une tragédie et ont tenté leur chance chez leurs frères du Sud, qui les considèrent comme des étrangers. Par le destin de gens ordinaires, Barbara Demick dresse le portrait d'un pays qui s'effondre, au moment où Kim Jong-un, troisième leader de la dynastie communiste, est intronisé par son père et alors que les deux Corées viennent d'échanger des tirs d'obus meurtriers sur une île du Sud (lire page 8).

Quel est l’état d’esprit des transfuges quand ils se retrouvent plongés dans une société de consommation où règne la liberté d’expression ?

La première réaction est un état de grande euphorie : ils arrivent dans des lieux superbes, équipés, où les gens vivent librement, consomment, où l’autre aussi est coréen, parle quasiment la même langue. N’oublions pas qu’ils ont été un seul et même pays. Puis, très vite, ils déchantent, car les deux pays sont devenus très différents. Avant leur séparation, les deux Corées avaient un niveau de vie similaire, c’étaient deux pays pauvres. Aujourd’hui, les Sud-Coréens méprisent ceux du Nord, non pas d’avoir été communistes, mais d’être pauvres et arriérés. Ils représentent leur passé. Il y a une fierté sud-coréenne d’avoir un appartement, une voiture, une bonne éducation, la poss