On comprend bien la situation mais est-ce du journalisme ? On comprend bien qu'aucun des journaux auxquels WikiLeaks avait proposé une telle masse de dépêches diplomatiques américaines n'ait pu les ignorer. Elles étaient déjà tombées dans le domaine public puisqu'elles avaient été remises à ce site par un jeune militaire qui avait pénétré un réseau informatique du Département d'Etat. Si d'aussi grands journaux que le Monde ou le New York Times n'avaient pas accepté de publier ces documents, d'autres l'auraient fait, sans avoir le souci ni les moyens de les analyser. Ces journaux n'avaient, en fait, pas le choix mais, sauf les affaires de corruption qui seraient à venir, cette publication ne relève pas du journalisme.
Lorsqu'un journal a des raisons de penser qu'un Etat ou quelque puissance que ce soit manipule l'opinion, a commis ou s'apprête à commettre un crime, son devoir est de tout faire pour le révéler. Sa raison d'être lui impose alors de braver la loi pour faire éclater une vérité nécessaire car c'est son rôle de contre-pouvoir. C'est la noblesse du journalisme, celle dont le New York Times avait donné l'exemple en publiant, au début des années 70, les «Pentagon Papers», le rapport secret où se lisaient tous les mensonges du gouvernement américain sur la guerre du Vietnam mais il n'y a rien, là, de comparable.
Aucune de ces quelque 250 000 dépêches ne prouve un quelconque crime. Aucun devoir journalistique, surtout, n’imposait de les publier