Banconi, quartier populaire des faubourgs ouest de Bamako, s’étend dans un dédale de ruelles cabossées. Des enfants jouent dans les flaques boueuses laissées par les dernières pluies. Au détour d’un mur en parpaings, le minaret bleu d’une mosquée en construction apparaît, surplombant le quartier. Au pied du chantier, une cinquantaine de personnes attendent à l’ombre, sur des bancs et des chaises en plastique. Hommes et femmes discutent à voix basse.
Comme tous les matins, Ousmane Chérif Madani Haïdara reçoit dans une demeure sans apparat. Cet imam de 55 ans a fondé en 1983 l'association des Ançar Dine («défenseurs de la religion» en arabe), un mouvement qui revendique «au moins» 100 000 membres et qui a pris l'ampleur d'une confrérie. Il faut attendre son tour, parfois pendant des heures, pour s'agenouiller aux pieds de Haïdara et avoir la chance de lui embrasser la main, geste qui porte bonheur selon les fidèles. En grand boubou, calot blanc sur la tête et chapelet à la main, le marabout, l'une des personnalités les plus populaires du Mali, pays musulman à 95%, invite à prendre place sur un canapé. Il préfère répondre aux questions en bambara, l'une des langues nationales, bien qu'il comprenne parfaitement le français.
Son mouvement n'a rien à voir avec l'islam salafiste dont se réclame Al-Qaeda au Maghreb islamique (Aqmi), groupe terroriste né en Algérie de l'ancien Groupe salafiste pour la prédication et le combat (GSPC), et aujourd'hui implanté dans les zones dése