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Libération

Moscou perd son maire, et un sculpteur son piédestal

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publié le 8 décembre 2010 à 0h00

De quoi faudrait-il débarrasser Moscou ? C’est la question que se posaient les médias, les politiciens et les Moscovites, alors que l’ex-maire Iouri Loujkov avait à peine passé la porte, déchargé le 28 septembre de la confiance du Président et de ses fonctions.

Instinctivement, la première chose qui vient à l’esprit : la gigantesque statue de Pierre le Grand (95 m) qui outrage depuis 1997 le cœur historique et géographique de la capitale. Cette œuvre colossale de l’artiste géorgien Zourab Tsereteli symbolise le «style Loujkov» : monumentalisme, amour du kitsch, et favoritisme institutionnalisé. Dans les bonnes grâces de son mécène de maire, Tsereteli, sculpteur de cour, s’est servi de la capitale comme d’un espace personnel. D’une générosité toute géorgienne, cet artiste prolifique n’a jamais été avare de bronze, n’hésitant pas à couler des œuvres formidables qu’il offrait de bon cœur à qui voulait bien les accepter.

En cas de refus, Tsereteli les plantait dans le jardin du Musée d'art contemporain (dont il est le directeur), la cour de son vaste musée personnel (dont il est l'exposant principal), ou au coin d'une rue de Moscou (dont il fut, sans partage, le sculpteur officiel). Selon une légende tenace, Tsereteli avait créé un Christophe Colomb géant pour l'anniversaire de la découverte de l'Amérique. Les Etats-Unis, bouleversés par tant de largesse, avaient poliment refusé le présent. Qu'à cela ne tienne, trois coups de tournevis, et Colomb est devenu Pierre. Cela tombait bi