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Libération
Reportage

«Tout est toujours à l’envers»

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Le 11 janvier 2010, Rose fête en famille une année qui s’annonce paisible. Le lendemain, le séisme en Haïti emporte ses parents et son conjoint. Pour «Libération», elle écrit son journal dans un pays en plein chaos.
Une rue de Port-au-Prince, le 10 décembre 2010 en Haïti. (© AFP Thony Belizaire)
publié le 11 décembre 2010 à 0h00
(mis à jour le 11 décembre 2010 à 10h32)

Je suis née le 7 juillet 1991 à l’hôpital de la communauté haïtienne qui se situe à Frères, une petite commune de Pétion-Ville. Je suis la benjamine d’une famille qui compte trois enfants, moi, mon frère et ma sœur. J’étais une petite fille comblée, intelligente, talentueuse et très naturelle. J’allais à une école qui s’appelait "le centre de formation pour la vie". J’étais deuxième ou troisième de ma classe. […] A 17 ans, ma sœur est tombée malade, ma mère a perdu son commerce. Nous étions en faillite, et tout brusquement, j’ai cessé d’aller à l’école parce mes parents n’avaient plus les moyens de nous y envoyer. J’ai eu du mal à accepter cela. Et puis, je suis tombée enceinte de mon petit ami, James. Ce n’était pas voulu. J’ai dû accepter de porter le bébé. Mais mes parents m’ont mise à la porte. J’ai été obligée d’aller habiter chez ma tante. Je ne pouvais pas "résister" aux reproches que me faisait ma mère.

Ma mère voulait qu’on se marie, et les parents de James aussi. Mais nous n’avons pas accepté car nous voulions finir nos études, pour pouvoir travailler et économiser afin de nous marier avec notre propre argent. Notre fils Key est né le 18 novembre 2008, et le 18 novembre 2009, nous avons fêté son premier anniversaire. Tout allait bien. James avait trouvé un travail et moi, pendant le mois de décembre, je travaillais aussi dans un restaurant. On a passé une bonne année 2009 et l’année 2010 s’annonçait paisible. Il n’y avait pas de soleil, le vent soufflait calmement.

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