Le jour se lève sur le bazar de Tagab. Les soldats français du 7e régiment de chasseurs alpins retirent leurs lunettes de vision nocturne. Une lumière blanchâtre éclaire à travers la brume des dizaines d'échoppes collées les unes aux autres. Les soldats longent la mosquée, traversent une décharge improvisée. De l'autre côté d'un fossé, deux chiens kuchis aux oreilles coupées, gros comme des veaux, hurlent. Un soldat les met en joue. La patrouille bifurque dans une ruelle du bazar. Il n'y a personne. «A cette heure-ci, le marché devrait être plein de gens. Ils ont vu les soldats, ils se méfient», estime le traducteur. «Nous avons retardé l'éveil de Tagab», confirme le capitaine Philippe (1).
Après une heure de patrouille, les chasseurs alpins rentreront sans incident à leur base, située à quelques centaines de mètres, sur le contrefort d'une montagne grise. Ils semblent soulagés : le district de Tagab, dans la province de Kapisa, à 70 kilomètres au nord-est de Kaboul, est la zone la plus dangereuse pour les soldats français déployés en Afghanistan. Dans la nuit du 17 au 18 décembre, Jonathan Lefort, 28 ans, sous-officier du commando Trépel, a été tué dans la vallée de Bedraou. Un autre soldat français a été blessé durant les combats. Quelques heures plus tôt, Benoît Dupin, capitaine au 2e régiment étranger de génie, était tué dans la vallée voisine d'Alasay. C'est aussi dans le district de Tagab, le long de la route en construction qui r