La Chine s’est lancée dans un projet plus pharaonique encore que le titanesque barrage des Trois-Gorges sur le fleuve Yang-Tsé. Il s’agit cette fois de construire un réseau de trois canaux et aqueducs qui traverseront verticalement le pays, à l’est, à l’ouest et au centre, sur plusieurs milliers de kilomètres. Ces trois canaux siphonneront l’eau des grands fleuves du sud pour l’acheminer à Pékin et sa région, où elle manque cruellement.
«Ce qu’on est en train de construire est grandiose et unique au monde»,
s’extasie Yu Pengtao, l’un des ingénieurs en chef de la ligne centrale du projet baptisé
«Nanshui Beidiao»
(diversion de l’eau du sud vers le nord).
L’expert, la quarantaine, vit en spartiate dans un bâtiment en ciment avec plusieurs dizaines de ses collègues, sur une berge du fleuve Jaune que traverse ce canal de 1 200 km. Il y dirige la construction, presque achevée, de la partie la plus spectaculaire du projet : un tunnel étanche de plus de 4 kilomètres de long sur 11 mètres de diamètre qui passe trente mètres sous le lit du fleuve Jaune.
Le débit du fleuve Jaune est trop capricieux et son cours trop pollué pour être lui-même mis à contribution. Une compagnie allemande a fourni l'impressionnant appareil de forage «mais pour le reste, c'est de la technologie chinoise». L'eau qui en sort est canalisée en direction du nord vers Pékin, dans un canal à ciel ouvert d'une vingtaine de mètres de largeur. Les dizaines de millions de mètres cubes qui aliment