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Libération
EDITORIAL

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publié le 29 décembre 2010 à 0h00

S'arrêter de marcher, de manger, de regarder, de lire, de dépenser, de penser à tout et à rien pour essayer d'imaginer ce que signifie être otage pendant un an. Essayer d'imaginer non pas la vie mais la survie d'Hervé Ghesquière et Stéphane Taponier, enlevés en Afghanistan le 30 décembre dernier… Ou celle des cinq salariés d'Areva et Satom enlevés au Niger par Aqmi en septembre, et celle de Denis Allex enlevé en juillet 2009 en Somalie… Comme nous avons ici, à Libération, essayé d'imaginer de janvier à juin 2005 ce que vivait Florence Aubenas lors de sa détention en Irak. Essayer d'imaginer sans jamais y arriver, forcément, tant l'expression en la circonstance est absurde, et vaine la tentative de mettre en mots ce temps, redouté sans fin, par ceux qui comptent les jours. «Pour m'évader, je m'étais créé un monde imaginaire», raconte Florence Aubenas. Ce monde-là lui appartient. Comme appartient aux familles d'Hervé Ghesquière et Stéphane Taponier cette souffrance qui leur donne le droit de crier leur colère. Pas à la hauteur aux premiers jours de la prise d'otages, le gouvernement a revendiqué hier le droit à la «discrétion». Il est dans son rôle. Comme le sont le comité de soutien, les associations, les médias, les citoyens, qui manifesteront aujourd'hui pour rendre visibles ceux qui ne le sont plus depuis un an. Et bruyants ceux que les talibans afghans veulent faire taire. Stratégie du silence pour ne pas faire monter le prix des enchères ou pub