Assis sur un affût de canon antiaérien de fabrication soviétique, deux soldats guettent l’horizon. Le vaste terrain, parsemé d’herbes sèches, est traversé par le pipeline acheminant le pétrole du Sud vers le Nord. Dans cet avant-poste de l’armée du Sud-Soudan (Armée populaire de libération du Soudan, APLS), situé à l’extrême nord de l’Etat d’Unité, riche en or noir, les troupes creusent des tranchées pour renforcer leur position, et gardent en permanence un œil sur l’armée d’en face, celle du Nord-Soudan.
La tension est montée d'un cran à l'approche du référendum d'autodétermination du 9 janvier, durant lequel les sudistes, en majorité chrétiens et animistes, doivent choisir entre la sécession ou l'unité avec le Nord musulman. En théorie, une frontière les sépare, mais en pratique, ce paysage aride ressemble à une ligne de front. Longue de plus de 2 000 kilomètres et toujours pas précisément tracée, elle aurait dû faire l'objet d'un accord, mais les négociations, laborieuses et portant sur de nombreuses autres questions cruciales (partage des revenus pétroliers, sort de la zone contestée d'Abyei), sont au point mort. A quelques kilomètres de la position, des soldats creusent des puits pour pouvoir s'approvisionner en eau, denrée rare dans cette contrée, en cas de conflit. «Nous sommes distants d'environ 400 mètres avec les SAF [les forces armées du Nord-Soudan, ndlr]», déclare le major-général James Koang Chol. Cet officier d'une soixantaine d'années, combattant de l