Professeur de médecine, Moncef Marzouki, 65 ans, préside le Congrès pour la République (CPR), un parti d’opposition tunisien interdit. Plusieurs fois emprisonné, il vit en exil en France et appelle à l’intensification des manifestations.
Avez-vous vu venir cette explosion ?
Honnêtement, non. Mais la Tunisie subit un niveau de répression, de corruption et de mensonge impensable. Il n’est donc pas étonnant que ce soulèvement soit lui aussi hors du commun. Jamais, la répression n’a causé 50 morts en un week-end dans ce pays. Il n’y a aucune raison que les manifestations s’arrêtent.
L’opposition est inaudible. Pourquoi ?
Il ne peut pas y avoir d’opposition sous une telle dictature, seulement une résistance civique. Ben Ali a créé une pseudo-opposition de cinq ou six partis, qui n’ont ni légitimité ni contact avec le peuple. A chaque fois que la Ligue tunisienne des droits de l’homme ou le Conseil national pour les libertés en Tunisie tentent de s’organiser, ils sont réprimés. Les véritables opposants sont en exil ou en prison. L’opposition, c’est donc le peuple. Tout ce qu’il est possible de faire depuis la France, c’est organiser la résistance civile via Internet, Facebook, les syndicats, ou les médias comme Al-Jezira. Personnellement, je regrette que certains appellent Ben Ali à mener des réformes et à gouverner avec l’opposition. Ce pouvoir n’est pas réformable, le peuple tunisien est en train de démontrer qu’il le rejette.
Alors, comment sortir de la crise ?
Il faut continuer à manifester jusqu’à ce que la dictature tombe. Mais seule l’armée peut déposer Ben Ali et prendre en main la tra