Ce qui se passe en Tunisie, au sens strict, est un événement. Rien ne pouvait le laisser prévoir, tant la Tunisie était l’un des pays, pires régimes politiques du monde après la Corée du Nord ; imaginons la population coréenne se soulevant contre Kim Jong-il. C’est un événement historique, en ce qu’il affectera pour toujours l’histoire de la Tunisie ; mais ce que «nous autres», Français, «démocrates», «occidentaux», devons bien comprendre, c’est que cet événement affectera, par rapport à ce que nous décidons de faire ici et maintenant, une histoire bien plus vaste que celle de la seule Tunisie. La situation tunisienne est très différente de celle de l’Algérie, de l’Egypte et même du Maroc. Pendant trente ans, l’autoritarisme éclairé de Bourguiba a offert à une terre pauvre en ressources naturelles un niveau de santé et d’éducation exceptionnel pour un pays du tiers-monde, un droit des femmes sans commune mesure avec les autres pays «arabo-musulmans», une économie équilibrée entre tourisme et agriculture. Héritant de ce petit miracle, et d’un des plus beaux pays du monde, Ben A. l’a façonné à son image : une dictature fasciste, policière, tortionnaire, paranoïaque, bureaucratique. Aujourd’hui, Kafka est tunisien (il s’appelle peut-être Taoufik Ben Brik). Vous comparez Ben A. à Ceausescu ? Vous êtes peut-être en-deçà de la réalité. Le Chili de Pinochet, tout aussi bien. La preuve ces jours-ci. Les cadavres vont bientôt sortir du placard, et vous serez stupéfaits. Nous avons lo
TRIBUNE
En Tunisie, l’impensable soulèvement est arrivé
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par Mehdi Belhaj Kacem, philosophe et écrivain et Chiraz Chouchane, Plasticienne, en thèse desthétique à Paris-I-la Sorbonne
publié le 18 janvier 2011 à 0h00
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