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portrait

Vann Nath, S-21 pour toile de fond

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Vann nath. Toute l’œuvre de ce peintre renvoie au centre de torture des Khmers rouges où il fut interné de 1978 à 1979.
publié le 22 janvier 2011 à 0h00

Il peignait, ça l’a sauvé. Alors il continue. Sans jamais oublier la «grande chance d’avoir su dessiner et peindre». Car Vann Nath n’a rien oublié. Ni les années de terreur et de famine du règne paranoïaque des Khmers rouges entre 1975 et 1979 ni les douze mois d’effroi passés à personnifier la propagande dans des portraits en pied de Pol Pot, Frère numéro 1, le chef suprême. A S-21, le centre de torture établi dans un lycée de Phnom Penh, ils étaient quatre, cinq, réquisitionnés pour glorifier le régime sanguinaire à partir de photos.

Vann Nath a été interné à S-21 le 7 janvier 1978. Là, dans des salles de classe aux murs ocres, au moins 13 000 personnes ont été enfermées, fers aux pieds, affamées et suppliciées. Ils seront sept à en réchapper après la chute du régime khmer rouge, en 1979. Trois sont encore en vie, un seul peintre a survécu : Vann Nath. A peine libéré, il s'est attelé à témoigner de l'enfer tortionnaire dans des tableaux d'un réalisme brut et halluciné. Il a tout révélé de la machine de mort khmer rouge hostile aux images. Ses toiles sont de plus en plus souvent exposées au Cambodge (où il vit toujours) et en France, notamment à l'université Paris-VIII qui s'est mobilisée pour faire connaître cette mémoire de l'extrême. Au printemps, Vann Nath y sera fait docteur honoris causa. Des acheteurs se sont manifestés. Des plasticiens de Phnom Penh ont participé à des ateliers et des œuvres collectives avec lui. «Il commence enfin à acquérir