Devant le 29, rue de Marseille, à Tunis, le trottoir est vide. Pas de chahut pour la rentrée des classes. Dans la cour de cette école primaire du centre-ville, quelques instituteurs se réchauffent autour d'un café fumant. «Les enseignants font la grève» à l'appel du syndicat des instituteurs, confirme Jamila Hachana, salariée depuis vingt ans de cette école : «Tout le monde refuse le nouveau gouvernement, ce ne sont pas des revendications spécifiques pour les instituteurs, c'est une façon de dire que nous voulons tous un changement complet. Nous ne voulons plus de ceux qui appartiennent à l'ancien régime.»
Jamila elle-même a fait les frais du système Ben Ali : de directrice, elle est devenue sous-directrice, puis assistante car elle refusait d'accorder des privilèges aux enfants et proches de Sadok Korbi, ministre de l'Education de 2005 à 2008. «Il fallait se laisser insulter par des enfants de 10 ans et dire qu'ils avaient raison, ou alors un enfant pouvait vous dire : dans une heure vous serez relevés de vos fonctions, ils se croyaient tout permis !»
Une mère retardataire arrive avec ses deux fils, mais il n'y a pas de professeurs pour les prendre en charge. Rebha Harzala, ouvrière, s'énerve : «Il y a déjà eu les vacances, maintenant la grève, c'est trop ! On peut manifester, mais pas bloquer l'enseignement. L'école, c'est très important pour nous. Nos enfants, c'est notre avenir, ce n'est pas à eux de payer !» Selon le syndicat des enseig