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Libération
Tunisie, la révolution en trois actes

Carthage, la chute

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ACTE III. Le 14 janvier à 17 heures, Ben Ali quitte un palais à l’atmosphère crépusculaire et s’enfuit du pays. Récit des dernières heures du tyran et de son clan.
Le Falcon à bord duquel le président tunisien Ben Ali est supposé avoir pris place, immobilisé le 14 janvier 2011 à l'aéroport Elmas Cagliari en Sardaigne. (AFP Mario Rosas)
publié le 5 février 2011 à 0h00

La dernière fois que Riad ben Fadhel a vu Zine el-Abidine ben Ali, c'était vendredi 14 janvier, à 17 h 10 précisément. Cet ancien journaliste, visé par une tentative d'assassinat et blessé de deux balles par des inconnus suite à un article critique sur Ben Ali, rentrait chez lui à la fin d'une journée agitée. Au carrefour reliant la commune de Carthage, où se trouve le palais présidentiel, et la route de l'aéroport de Tunis, son véhicule a été stoppé pour laisser passer une quinzaine de 4 x 4 de luxe aux vitres teintées : Porsche Cayenne, Explorer, «toute l'armada».«Je me suis dit : tiens, c'est le Président ! J'ai regardé l'heure par réflexe. On ne savait pas ce qui se passait.»

Le cortège laisse à sa droite la fastueuse mosquée el-Abidine, file pied au plancher sur l’autoroute de Sousse, direction l’aéroport international de Tunis. Il entre dans la caserne de la Garde nationale pour rejoindre la base aérienne militaire jouxtant les pistes. Riad Ben Fadhel, qui dirige aujourd’hui une agence de communication, ne savait pas à ce moment-là que Ben Ali s’apprêtait à quitter la Tunisie pour l’Arabie Saoudite, perdant du même coup le pouvoir après vingt-trois ans de règne sans partage.

Mais le Président le savait-il lui-même ? «Je ne le jurerais pas, avoue une source très proche de l'ex-président et qui a ses habitudes au palais. Et si Ben Ali était allé accompagner sa femme Leila, son fils Mohamed et sa fille Halima pour les mettre en sécurité ?»