Menu
Libération
TRIBUNE

Quand un peuple sort du sommeil

Article réservé aux abonnés
Nous, les Egyptiens, étions surnommés les «autruches endormies». Comment nous sommes-nous réveillés ?
par Nabil Naoum, Ecrivain égyptien
publié le 11 février 2011 à 0h00

Que vit l'Egypte en ce moment ? La résurrection de millions de sphinx qui s'envolent vers la liberté, vers la dignité humaine, pour affronter le minotaure aveugle qui a refusé jusqu'à hier soir de voir qu'il avait fait son temps. Les manifestants antirégime sur la place de la Libération (Tahrir) au Caire, et ailleurs, refusent, quant à eux, le compromis et les propositions humiliantes d'un système qui a toujours eu pour spécificité de piller les richesses du pays. Des femmes et des hommes, réprimés par un ordre policier et des lois d'état d'urgence, élèvent enfin la voix pour dire : «Ça suffit !»

Je suis à la fois sidéré et très fier de ce qui se passe en Egypte. Ma vie de jeune garçon a commencé avec la révolution de 1952, un coup d’Etat militaire en fait, qui a transformé la monarchie en république. Seule l’armée avait alors investi la rue. Soixante ans plus tard, des millions de personnes s’y retrouvent, prêtes à périr pour en finir avec le régime de Moubarak. Un Président en fonction depuis trente ans ne craint pas de manier les outils mis à sa disposition, comme la corruption ou la répression. Des milliers de citoyens ont été tués, torturés, certains même ont disparu, bercés par l’illusion que Moubarak était notre père à tous. Nous, les Egyptiens, étions surnommés «les autruches endormies», en particulier par les citoyens de pays dirigés par des tyrans.

La question qui se pose maintenant, c’est : comment la Belle au bois dormant a-t-elle réussi à se réveiller ? L