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Libération
Interview

«Je sens pour la première fois ce que le mot "peuple" veut dire»

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Alaa el-Aswany . Romancier
publié le 12 février 2011 à 0h00

«Il y a quinze jours, à cette heure-ci, je vous disais qu’une nouvelle Egypte était en train de naître. Je ne me suis pas trompé. D’ailleurs, je n’ai plus de voix à force d’avoir tant crié avec la foule.

«Les gens ont vraiment eu l’impression, jeudi soir, que Moubarak les prenait pour des imbéciles, il a redoublé leur colère. J’ai écouté ce discours parmi les 2 millions d’hommes et de femmes présents place Tahrir, j’étais là quand ils ont tous levé leurs chaussures en l’air, c’était incroyable, un moment très fort. Ils étaient tous prêts à mourir pour le faire partir et Moubarak insistait! Nasser, lui, après la guerre de 1967 contre Israël, perdue par l’Egypte, avait dit qu’il était le seul responsable et donné sa démission. Avec honneur ! On ne pouvait pas imaginer que Moubarak ne voit pas à la télévision ces millions de personnes réclamant son départ !

«Il y a eu un conflit évident au sommet du pouvoir. Ce n’est pas nous qui avons annoncé, jeudi, que Moubarak allait partir, c’est le chef de son parti ! Et d’ailleurs son discours, dans la soirée, ressemblait fort à un montage. On était sûr que l’armée était avec nous. Mais ça me rendait malheureux que Moubarak ne sente pas le danger qu’il faisait courir à son pays. J’ai participé à cette révolution depuis le début, la colère s’était accumulée, on ne peut pas jouer avec ça.

«La violence ne vient pas de la révolution, elle est déjà là : plus de 500 morts, des milliers de blessés, des criminels qui ont été libérés et armés… c’est