L'immense «place de la Libération», en plein centre-ville du Caire, a été, plus que l'emblème, le poumon de la révolution qui a secoué l'Egypte pendant dix-huit jours.
Conquise le 28 février, «Midan Tahrir» est devenue une vaste agora populaire, le lieu d'un enivrement collectif. Son occupation, nuit et jour, symbolisait le mot d'ordre: «Nous resterons là jusqu'à ce qu'il [Moubarak] parte».
Las d'être des sujets, les Egyptiens s'y sont faits des citoyens, libres, construisant en miniature l'Egypte dont ils rêvaient. En cas de doute sur l'issue de ce bras de fer peuple/raïs: un tour à Tahrir, et vous en ressortiez persuadés que ses occupants -divers, enjoués et en colère, pacifiques, sûrs de leur victoire- finiraient par l'emporter.
Attaquée, Tahrir a résisté. Et n'a jamais basculé dans la violence, face à un Président qui a joué avec les nerfs des manifestants.
Retour en six phases sur dix-huit jours de révolution.
La genèse
L'appel à manifester a été lancé comme une bouteille à la mer, sur Facebook. Plusieurs groupes invitent les Egyptiens à se mobiliser ce 25 janvier, «journée de la police». Un jour férié en Egypte, en référence à une attaque de l'armée britannique contre des policiers, en 1952. 50 d'entre eux sont tués, déclenchant des émeutes dans tout le pays.
Soixante ans plus tard, les Egyptiens honnissent leur police, qui, au titre de l'état d'urgence toujours en vigueur, peut procéder à des détentions arbitraires. Et qui torture. En juin 2010, Khaled Saïd en a fait les