Ils ont presque fini d’enlever les branches, entassées sur la chaussée, qui tenaient lieu, il y a quelques jours encore, de barricades, dérisoires obstacles. Les arbres garderont longtemps leurs silhouettes amputées, les voitures sont réapparues. Derrière le bâtiment concave du Mogamma, antenne administrative du ministère de l’Intérieur, des jeunes nettoient le mur des dazibaos de la révolution. La place Tahrir est là, toute proche, Garden City en est l’antichambre. Un quartier cauchemar pour ceux qui n’y vivent pas, incapables de se repérer dans les entrelacs de rues plantées de vieux palais vides, d’immeubles autrefois bourgeois, de banques, d’ambassades, d’épiceries un peu miteuses et mal éclairées.
Deux grandes droites l’encadrent, la corniche du Nil et l’avenue Kasr el-Eini, qui mènent à Tahrir, où tournent désormais les voitures au son des klaxons. Elle ne se ressemble déjà plus, cette immense esplanade. Parties les tentes, les banderoles, la foule. Restent le souffle, la braise qui couve. Car les Egyptiens, qu’on disait si passifs, ont eux aussi changé. Comme ceux de Garden City, Mona, son fils Moufid, son mari Ali qui vivent là, non loin d’Ahmed et Mohamed, les vendeurs de jus de fruit, Alaa el-Aswany l’écrivain, ou Reem l’étudiante. Récit des dix-huit jours qui ébranlèrent l’Egypte, par les habitants du quartier.
Mardi 25 janvier, rue Hod el-Laban «Pas de bêtises !»
Mona sait vaguement que des mouvements d'opposition ont appelé à la manifestation. Le