L’horreur avait son quartier général : la caserne Fadhil, l’immense périmètre près du centre de Benghazi, où soldats et mercenaires tiraient sur la foule avec toutes les armes possibles et exécutèrent froidement les officiers qui refusèrent de se plier aux ordres. Aujourd’hui, la caserne Fadhil, petite ville dans la ville, a été comme abolie par les insurgés, qui l’ont ravagée, détruite et brûlée avec une rage sans pareille, n’épargnant ni les voitures ni les blindés, et surtout pas la villa du dictateur libyen, Muammar al-Kadhafi.
Battement de cils. Mais l'horreur possède à présent un autre quartier général : l'hôpital Al-Jala, où ont été conduits les morts et les blessés graves de l'insurrection. Des corps en pièces, déchiquetés, éclatés, que le médecin chef de la section chirurgicale, le Dr Abdallah, tient à montrer. Il veut tout montrer. Les grands blessés, dont la vie se manifeste parfois par un rare battement de cils. La morgue, spectacle terrible, au-delà des mots. «J'ai vu tous les grands conflits qui ont traversé la Libye : les violentes émeutes de 1996, le bombardement américain de 1984 sur la ville, qui a été très dur. Mais, croyez-moi, je n'ai jamais rien vu de tel. Même les Américains étaient des gens charitables à côté de l'homme de Tripoli. Regardez ce corps, il a été traversé par un projectile anti-aérien», explique d'une voix étrangement calme le médecin en découvrant un corps coupé en deux. Puis, il montre les cadavres ca